Ariane Mnouchkine : une vie de théâtre

Le Blog Lifestyle 10 juillet 2017 0

Une vie entière consacrée au théâtre. A 78 ans, la motivation d’Ariane Mnouchkine demeure intacte. Son talent aussi : Une chambre en Inde, son 28e spectacle en tant que réalisatrice, sera bientôt à l’affiche à l’Armory de New-York, après avoir connu à La Cartoucherie un succès tant critique que public. Abordant les sujets des attentats, de la condition féminine et du réchauffement climatique, la pièce est avant tout une touchante déclaration d’amour à l’art théâtral.

Ariane Mnouchkine née pour le spectacle

C’est dans la banlieue parisienne des années 1930 que grandit Ariane Mnouchkine, fille d’un producteur de cinéma et d’une mère qui compte parmi sa descendance d’illustres acteurs londoniens. C’est d’ailleurs en Angleterre, alors qu’elle étudie à Oxford, que la jeune femme découvre le théâtre. C’est pour elle une révélation : alors que le cinéma lui paraît strict et superficiel, la scène promet un espace de liberté sans limite. De retour à Paris, elle monte sa propre troupe, le Théâtre du Soleil, en 1964, entourée d’amis et de professionnels tous aussi enthousiastes qu’elle. Parmi eux, Jean-Claude Penchenat et Philippe Léotard. Constituée sous forme de Société coopérative ouvrière de production, la troupe passe ses premières années en tournée à travers la France avant de se fixer dans un lieu qu’elle ne quittera plus : La Cartoucherie.

La Cartoucherie comme palais idéal

Loin de renier le théâtre classique, Ariane Mnouchkine et sa troupe aspirent à une forme radicalement nouvelle, faite de communion avec le public et fruit d’une perpétuelle discussion avec le collectif. Paradoxalement, c’est dans le cadre d’un ancien bâtiment militaire que l’état d’esprit libertaire du Théâtre du Soleil va trouver son plus bel écrin. Située en plein cœur du bois de Vincennes, La Cartoucherie a tour à tour été utilisée comme manufacture de poudre, caserne, et même centre de détention durant la guerre d’Algérie.

Laissé à l’abandon, l’édifice, encerclé par les barbelés et tombant en ruine, accueille à la fin des années 1960 prostituées et blousons noirs. Le Théâtre du Soleil visite ces lieux par hasard à l’été 1970, et tombe instantanément sous le charme. Tout le monde met alors la main à la pâte, installant l’eau courante, l’électricité, refaisant les façades et la toiture, pour donner la première représentation le 26 décembre de la même année. Le but est atteint : Ariane Mnouchkine, qui cherchait absolument un lieu non-conventionnel, a fait de La Cartoucherie une place d’échange et de communion autour de l’art du spectacle.

Une vie d’engagements

La politique, la religion, les sujets de société sont toujours abordés dans les pièces mises en scène par Ariane Mnouchkine. Le droit à l’avortement ainsi que l’abolition de la peine de mort ont longtemps été au cœur de ses combats, remplacés aujourd’hui par la lutte contre l’intégrisme, la défense des sans-papiers et le respect des droits des femmes. Nombreux sont les sujets pour lesquels elle s’est investie, de la cause du Tibet à la candidature de Ségolène Royal en 2007.

Résolument égalitaire, Ariane Mnouchkine compte dans sa troupe autant de femmes que d’hommes, chacun percevant un salaire équivalent. Quant au spectateur, libre à lui d’arriver plusieurs heures en avance pour flâner dans les locaux, de s’installer où bon lui semble et de discuter avec les membres de l’équipe.

Faire vivre l’utopie

L’œuvre d’Ariane Mnouchkine suscite le respect à plus d’un titre. La qualité de ses pièces, son constant degré d’exigence et sa rigueur font de chaque représentation une nouvelle aventure. Son talent pour aborder avec tact des sujets parfois graves et polémiques permet de charger chaque pièce d’un message fort et clair. Mais son plus grand succès aura été de démontrer qu’une utopie peut, parfois, fonctionner. L’aventure du Théâtre du Soleil en est l’exemple concret, alors que la majorité des rêves des années 60 se sont évanouis. Projet collectif, populaire, communautaire et cosmopolite, son théâtre résiste depuis plus d’un demi-siècle, porté par une volonté sans faille qui a su fédérer un public fidèle.

Ecrire un commentaire »