Du tatouage tribal à la marque de rébellion des urbains occidentaux, le musée du quai Branly consacre une exposition à ce phénomène aux multiples facettes, « Tatoueurs, tatoués », jusqu’au 18 octobre 2015. Le tatouage ne se limite plus, et ne s’est d’ailleurs jamais limité, à une ancre sur le biceps d’un marin ou un « Je t’aime Monique » laborieusement écrit sur l’épaule d’un repris de justice. Mais alors qu’il était demeuré jusqu’ à récemment l’expression d’une forme plus ou moins sulfureuse de marginalité et de rébellion dans les sociétés occidentales modernes, ce phénomène a pris aujourd’hui une ampleur sans précédent, se démocratisant au sein de nombreuses couches de population. C’est l’occasion pour le musée du quai Branly, dont la vocation consiste à explorer les cultures primitives les plus diverses, de revenir sur les origines tribales de cette pratique ancestrale et de nature rituelle, ainsi que sur ses manifestations contemporaines et ses artistes à part entière.
Les origines et l’histoire du tatouage
L’exposition s’ouvre sur l’aspect historique du tatouage, en évoquant l’ensemble des peuples l’ayant pratiqué jusqu’ à aujourd’hui. Les traces les plus anciennes de tatouage semblent remonter à -3000 en Europe, et une chronologie mondiale nous emmène jusqu’au 20e siècle. Chronologie au cours de laquelle sont évoqués les fameux tatouages maoris comme ceux pratiqués par les moines bouddhistes en Asie du Sud-Est, de même que les tatouages réalisés au 19e siècle pour être montrés dans les foires et ceux des marginaux en occident au 20e siècle.
Une attention particulière sera portée aux origines du tatouage dans trois civilisations : le Japon tout d’abord, où le tatouage fut créé comme outil de punition par les militaires, avant de connaitre son apogée au début du 19e siècle, se rapprochant de l’art des estampes. L’Amérique du Nord ensuite, où le tatouage fut pratiqué par les tribus amérindiennes, longtemps avant que ne soient créées la toute première boutique de tatouage à New York en 1846 puis la première machine à tatouer électrique en 1881. En Europe enfin, où le tatouage fut réprimé par le christianisme après s’être largement répandu chez les Pictes et les Romains. Il n’y réapparaitra qu’au 19e siècle.
Les différentes approches contemporaines du tatouage
La renaissance du tatouage tribal et traditionnel, motivé notamment par l’explosion récente du tourisme et des échanges internationaux, est évoquée aux travers des nouvelles écoles et de créateurs reconnus en Nouvelle-Zélande, en Polynésie, en Thaïlande ou encore en Indonésie et aux Philippines. L’étude se porte en particulier sur l’influence de la modernité par rapport au caractère rituel de ces tatouages, et l’évolution de style qui en découle. De nouvelles tendances apparaissent également en Chine ou chez les Latino-américains, chez qui les imageries traditionnelles et contemporaines se mêlent pour donner naissance à une forme de tatouage nouvelle, à la confluence du folklore et des codes urbains de la rue.
Enfin, huit artistes plus avant-gardistes et leur style plus personnel et dégagé des codifications décrites jusqu’ à maintenant sont mis à l’honneur sur huit photographies, et 32 œuvres inédites spécialement créées pour l’événement par autant de maitres viennent clore l’exposition. Ces dernières sont réalisées soit sur des membres factices – bras, jambes ou torses – soit sur toile, dans des travaux à l’encre mais également à l’aquarelle, à l’acrylique, au feutre ou à la mine de plomb.
Le musée du quai Branly et les multiples visages du tatouage
« Tatoueurs, tatoués » est une exposition très complète, qui propose un éclairage approfondi sur les multiples visages du tatouage, cet art de l’affirmation de soi par le corps, en pleine mutation aujourd’hui.