La Samaritaine ! Ses façades mêlant art-déco et art-nouveau, ses vitraux et ses mosaïques, sa coupole, son escalier monumental… sans oublier son fameux slogan publicitaire scandé sur tous les tons depuis les années 1960. Pour beaucoup de Franciliens, la Samaritaine représente la quintessence du grand magasin parisien au même titre que le BHV, le Printemps ou les Galeries Lafayette. Du moins jusqu’en 2005, date à laquelle la Samaritaine entame une période de turbulences qui ne s’achèvera qu’en avril prochain lors de sa réouverture programmée.
Temple du chic parisien
La rénovation du bâtiment principal situé entre la rue de Rivoli et le quai du Louvre (1er arrondissement) rendra hommage, selon le site Internet de l’enseigne, à « l’audace et l’esprit d’innovation qui marquent depuis sa création la maison Samaritaine ». Les sommes investies et la durée des travaux font de ce chantier l’une des rénovations les plus ambitieuses qu’a connue la capitale.
Lorsque le groupe LVMH se porte acquéreur du magasin en novembre 2000, « La Samar » connaît de nombreuses difficultés financières atteignant des pertes de 300 millions de francs par an. Ce qui n’aura pas empêché Bernard Arnaud de débourser près de 300 millions d’euros pour transformer le grand magasin en temple du luxe et du chic parisien.
Pourtant, quatre ans après son acquisition par le groupe de luxe, l’enseigne doit fermer ses portes pour raisons de sécurité. Électricité défaillante, planchers menaçant de s’effondrer et problèmes liés à la structure du bâtiment nécessitent alors de lourds travaux. Cette rénovation qui devait au départ durer six années, va donc s’étaler sur quinze ans. Periode au cours de laquelle vont se succéder les projets, les recours, les expertises et autres désaccords donnant au chantier l’allure d’un feuilleton aux multiples rebondissements.
Batailles judiciaires
Lors d’une conférence de presse donnée le 19 novembre 2019, Jean-Jacques Guiony, directeur financier du groupe LVMH et PDG du grand magasin, a ainsi résumé ces quinze dernières années : « Il a fallu cinq ans pour définir un projet et convaincre la mairie de Paris; cinq ans pour obtenir le permis et répondre aux recours, et cinq ans pour les travaux colossaux qui ont été engagés ».
Certains des projets envisagés, notamment la construction d’une gigantesque façade en verre ondulé longue de 73 mètres et haute de 25 donnant sur la rue de Rivoli, ont donné lieu à un mouvement de contestation mené par la Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de France (SPPEF). À deux reprises, le tribunal administratif ainsi que la cour administrative d’appel de Paris ont annulé les permis de construire arguant de l’incompatibilité du projet imaginé par l’agence japonaise Sanaa avec le cachet haussmannien du quartier. Après une longue procédure, le Conseil d’État a fini par valider la rénovation qui aura finalement débuté en 2015. 750 millions d’euros sont déboursés à cet effet, mobilisant chaque jour 600 ouvriers dans un chantier inédit par son ampleur.
« Un lieu de vie au-delà d’un lieu de commerce »
Exit les rayons divers et variés de l’ancienne Samaritaine, la nouvelle « Samar » est résolument orientée vers le luxe, sa partie commerciale étant gérée par DFS (filiale de LVMH), se focalise principalement sur les voyageurs internationaux. Si le luxe français est représenté, la Samaritaine va aussi devenir un lieu de vie comprenant bureaux, crèche, logements sociaux, restaurants et hôtel cinq étoiles de 72 chambres.
En tout, 1500 postes s’apprêtent à être créés dont certains réservés prioritairement aux anciens employés. La direction espère ainsi redynamiser le quartier en attirant les visiteurs qui devraient être dès la première année, selon les estimations du groupe, plus de cinq millions à se presser dans « le plus petit des grands magasins ». Sur les 30.000 m² originellement dédiés à la vente, seuls 20.000 auront été conservés. Après ces interminables péripéties, la Samaritaine devrait donc effectuer un retour flamboyant célébrant par là même ses 150 ans d’existence.
Photos : Triazur.com / leparisien.fr / wemp.app/