La pizza, le burger et le sandwich sont solidement ancrés en tête du classement des aliments les plus consommés par les Français depuis des années maintenant. Mais il semble qu’un invité inattendu, le bagel, pourrait prochainement venir chatouiller le triumvirat du snack hexagonal. Apparu il y a quelques années au menu de quelques sandwicheries parisiennes, son succès fulgurant l’a propulsé au sein des incontournables de la restauration rapide française. Quelle est l’origine du bagel? A quoi est dû son succès et celui-ci va-t-il durer?
Origine et itinéraire du bagel
Commençons par la légende: elle conte qu’un boulanger viennois créa en 1683 un petit pain en forme d’étrier (Bügel en allemand) en hommage au roi Jean III Sobieski de Pologne-Lituanie, qui venait de repousser l’invasion des armées turques aux portes de la capitale autrichienne. Celui-ci était un cavalier hors pair, d’où la forme choisie pour le petit pain, qui aurait évolué vers l’anneau que l’on connaît aujourd’hui.
La réalité est moins chevaleresque: le bagel provient en fait de la population juive de Pologne et remonte au moins à 1610. Il désignait alors une préparation destinée aux femmes venant d’accoucher. Par la suite, le bagel suit la route des juifs d’Europe et débarque à Montréal d’abord puis dans le reste de l’Amérique du Nord et notamment à New York au début du XXe siècle, alors que ceux-ci migrent en masse outre-Atlantique pour fuir les persécutions dont ils sont victimes dans leurs pays d’origine.
Les raisons du succès
La première raison de l’ascension du bagel en France suit naturellement son itinéraire ultérieur: comme bien des aliments parmi les plus répandus au pays de la gastronomie, il résulte directement de l’américanisation de nos modes de vie et se calque parfaitement sur les besoins et envies des consommateurs français d’aujourd’hui. Il est pratique, nourrissant, s’accommode d’une infinité d’accompagnements. Mais cela ne suffit pas à expliquer ce qu’il apporte de plus qu’un simple sandwich, déjà largement présent chez nous.
Sa recette tout d’abord le rend plus épais, moelleux et onctueux que la plupart des pains réalisés avec les pâtes utilisées dans la boulangerie traditionnelle, et il peut être indifféremment consommé froid ou chaud. Son aspect visuel, ensuite, est plus ludique et son fameux trou central offre une plus grande exposition aux ingrédients situés à l’intérieur de la préparation. Cela peut paraître secondaire mais ce genre de détails est absolument primordial sur les étalages surchargés des sandwicheries.
Le bagel a trouvé sa place
Il s’est vendu 100 millions de bagels en France en 2013, 250 millions en 2015, et ce chiffre ne cesse d’augmenter. Il existe dorénavant une ribambelle d’enseignes spécialisées se consacrant principalement au bagel. Bagelstein, Bagel Corner, Factory & Co et Bruegger’s sont les quatre principaux acteurs du secteur avec déjà plus de 200 points de vente, à quoi il faut ajouter les produits présents dans les rayons de supermarchés et chez les restaurateurs indépendants.
On prévoit que le format du bagel pourrait à terme occuper jusqu’à 10 % du marché de la sandwicherie. Le produit est en effet parfaitement adapté à une tendance forte de l’alimentation française, le “fast casual”. Il s’agit de pratiquer une restauration présentant les avantages d’accessibilité et de rapidité du fast food, mais en proposant une qualité, une fraîcheur et un niveau de gamme gustatif comparables à ceux de la restauration traditionnelle.
Le bagel semble donc avoir un avenir brillant devant lui, à la condition qu’il ne néglige pas à la longue son positionnement qualitatif au profit de la rentabilité immédiate.