Bibi Seck est une figure star du design au Sénégal, son pays d’origine, tout en étant aussi reconnu en Europe et aux Etats-Unis. Depuis plus d’une vingtaine d’années, il a multiplié les collaborations prestigieuses avec Toyota, Ikea, Herman Miller entre autres. Aujourd’hui, il se consacre à la peinture tout en dessinant des meubles colorés, qu’il expose dans sa galerie de Dakar, le Quatorzerohuit, en référence à son jour de naissance.
Le design chez Bibi Seck c’est avant tout la passion du dessin : « J’aime dessiner, c’est une obsession. J’illustre ce que j’ai dans ma tête. C’est comme si j’avais une vie parallèle » explique-t-il au Monde. Sa marque de fabrique, c’est la courbe. Car selon lui : « Entre deux points, le plus court chemin, c’est la droite. Mais le travail du designer, c’est de rendre ce chemin plus intéressant. »
Bibi Seck propose ainsi des formes intemporelles, dans une recherche affichée de simplicité. Car selon lui « même un enfant devrait pouvoir les redessiner ». Bibi est en effet désireux de démocratiser le design.
Valoriser le talent des artisans sénégalais
De son vrai prénom Ibrahima André, Bibi naît à Paris, puis grandit à Dakar. Au milieu des années 1980, il est en prépa à Paris pour intégrer une école d’ingénieur. Son père, diplomate, souhaite qu’il devienne architecte. Bibi, lui, est déjà attiré par le dessin. En se baladant dans le Marais, il passe devant une école de design. Et c’est le déclic.
A l’époque il n’y connaît rien. Quand il en parle à son père, c’est non : « Je ne veux pas de rastaman dans la famille ». Mais Bibi finit par le convaincre. Son diplôme en poche, Bibi est recruté par Renault, en 1990, à la direction du design. Et même s’il est le premier Africain à être recruté dans ce domaine, il n’en fait pas une histoire : « Il n’y a rien eu d’Africain dans mon travail avec Renault, souligne-t-il. Le design n’a pas de frontière. C’est sa force. »
Après quatorze années passées chez le fabricant automobile, il ouvre sa propre agence de design en 2004 avec sa femme Aysé Birsel, originaire de Turquie et elle aussi designer. L’agence Birsel + Seck est d’abord basée à New York avant d’être relocalisée à Dakar. Bibi Seck y collabore avec de nombreux artisans locaux et admire leur capacité à sublimer le bois ou même le plastique avec très peu de moyens.
Grâce à cette collaboration, il les pousse à valoriser leur savoir-faire. « Je ne veux pas qu’on profite de leur précarité. Il faut les rémunérer au plus juste. Le développement du pays ne peut pas se faire sans les artisans et la mise en valeur de leur travail. »
Longtemps, Bibi avait un rêve : ouvrir une école de design à Dakar. Aujourd’hui, il choisit de consacrer son temps à la peinture, et compte sur les nouvelles générations pour le réaliser. Avec au cœur la foi dans le talent de ses compatriotes : « Tous les Sénégalais sont des designers. Ils ont une force créative sans avoir eu de formation académique ».
Photos : lemonde.fr