Loubna Abidar, actrice marocaine de 31 ans a publié son livre autobiographique « La Dangereuse » en mai dernier. Son rôle dans le film « Much Loved » a choqué l’opinion publique et le gouvernement marocain. L’actrice a dû fuir un climat hostile en s’exilant en France. Dans son livre, Loubna Abidar dévoile sans concession sa condition de femme au Maroc et rappelle les raisons de son exil.
La polémique de « Much Loved »
Révélée en 2015 dans le film de Nabil Ayouch « Much Loved » où elle incarne une prostituée de Marrakech, Loubna Abidar a ainsi dévoilé la réalité d’un sujet qui dérange au Maroc : le monde caché de la prostitution et les conditions des femmes dans le pays.
Elle y incarne Noha, jeune femme vivant de relations tarifées à Marrakech. Avec ses amies, elle montre le côté tabou d’une société qui se sert d’elles tout en reniant leur existence. Le film aborde également les problèmes de société comme la corruption policière et les relations familiales dirigées par l’argent.
Son personnage n’a évidemment pas plu au gouvernement marocain qui a interdit le film dans le royaume, le jugeant « outrageant aux valeurs morales et à l’image de la femme marocaine », mais le film a été bien accueilli en France puisque l’actrice a été nominée pour le César de la meilleure actrice en 2016. Après la sortie du film, l’actrice fut vivement critiquée dans son pays natal et même, le 5 novembre 2015, violemment agressée dans les rues de Marrakech. Sans aucun soutien dans son pays (elle n’aurait pas pu porter plainte), l’actrice s’est vue contrainte de s’exiler en France pour garantir sa sécurité.
Sortie de son autobiographie, « La Dangereuse »
Installée à Paris depuis lors, Loubna Abidar est plus que jamais déterminée à défendre la cause féminine. Dans son autobiographie, co-écrite avec la journaliste du Monde, Marion Van Renterghem, elle retrace sans tabou ni concession sa vie, sa naissance mal acceptée par ses parents qui espéraient un garçon, de son enfance à Marrakech, son adolescence dans la jet-set à ses débuts dans le cinéma jusqu’à la polémique de « Much Loved ».
Mais celle qui incarne Noha dans le film d’Ayouch se sert de son histoire pour dénoncer les conditions et la place de la femme dans le monde arabe, ainsi que ce nouvel islam radical qui considère selon elle les femmes libres comme des « putes ». Elle symbolise la division que suscite la femme dans la tradition arabo-musulmane. Avec son personnage, Loubna Abidar représente toute une catégorie de femmes à la fois fortes et fragiles qui, bien que suscitant le mépris voire le dégoût de toute une partie de la population, permet à de nombreuses familles de vivre.
Désormais, Loubna Abidar tente de se projeter vers l’avenir et de se servir de sa nouvelle notoriété pour faire changer les mentalités au Maroc grâce à son livre, en racontant son histoire. L’actrice est aujourd’hui en lice pour le casting du prochain film de Michael Haneke intitulé « Happy End », aux côtés notamment de Isabelle Huppert et Mathieu Kassovitz.