Dans le cadre de l’exposition « Daimyos, seigneurs de la guerre au Japon », le musée Guimet rassemble pour la première fois une trentaine d’Ō-yoroi, les armures de samouraïs. Équipements militaires et véritables œuvres d’art, elles sont à la fois le symbole de la toute-puissance guerrière et l’expression du pouvoir des grands noms du Japon féodal. Le Musée national des arts asiatiques s’associe au Palais de Tokyo pour présenter des pièces exceptionnelles venant de collections publiques et privées. Vous avez encore jusqu’à dimanche pour venir les admirer !
Les 33 armures de samouraïs exposées proviennent pour la plupart de l’époque Edo. Selon Jean-Christophe Charbonnier, commissaire de l’exposition, elle était une période de calme relatif : « Sous le joug militaire du shogun, les seigneurs se regardaient en chiens de faïence et cherchaient à s’impressionner plus qu’à se combattre ». Par ailleurs, elles n’offraient qu’une sécurité relative à cause des armes à feu. Les armures étaient davantage utilisées pour représenter un nom ou incarner un rang.
Une fonction militaire et symbolique
Les armures des samouraïs sont le résultat de techniques sophistiquées. Elles sont un assemblage complexe de matière tel que le cuir, la laque ou la soie mais aussi de matériaux plus surprenant comme les plumes de paon, les poils d’ours ou la peau de poisson tannée. Le tout offrait une ergonomie et une légèreté supérieure à l’équivalent occidental bien que garantissant une protection comparable. Toutefois, ces équipements étaient très chers et se transmettaient de génération en génération.
Le casque, ou Kabuto, était un élément important de l’armure du samouraï. Composé de diverses plaques en métal forgé et rivetées entre elles et souvent orné de cornes et d’ailes, il a une fonction protectrice mais aussi symbolique. Il arbore parfois des formes et des décors inspirés de la nature alors que le Japon de l’époque est encore fortement imprégné d’animisme. L’ensemble donne un mélange singulier, presque monstrueux, de quoi susciter l’effroi chez les adversaires.
Elles inspirent crainte et respect
La crainte et le respect que ces armures de samouraïs inspirent est à l’image de leur utilisateurs. Les Daimyos, seigneurs de guerre et propriétaires terriens, ont longtemps exercé leur autorité dans l’archipel de manière indépendante vis-à-vis du pouvoir central du Shogun. Les Daimyos se livrent à de guerres incessantes pour accroître leur territoire. Ces combats permanents prennent fin en 1600 après la bataille de Sekigahara. Le Shogun reprend alors le contrôle des seigneurs de guerre.
Sous le règne des Tokugawa, la liberté des Daimyos est considérablement diminuée. Tout d’abord, leur nombre est réduit à 200. Ensuite, les seigneurs doivent résider six mois par an à Edo, ancien nom de Tokyo, et passent le reste de l’année dans leur fief. Toutefois, l’empereur impose qu’ils laissent une partie de leur famille en résidence dans la capitale pour mieux les contrôler. Les armures de samouraï ne sont alors plus que des équipements d’apparat.
Des armures devenue rares
L’ère Meiji et la modernisation du Japon sonne définitivement de glas des Daimyos et l’amélioration des matériels militaires rend les armures de samouraï complètement obsolète. Beaucoup de seigneurs appauvris se résolvent alors à vendre leurs équipements à des acheteurs étrangers, le Japon étant très à la mode en Occident après 1871. Aujourd’hui, les armures complètes sont rares, ce qui rend le travail des commissaires de l’exposition particulièrement remarquable.
Les armures de samouraïs, souvent détenues par des propriétaires privées, sont un trésor généralement inaccessible au grand public en dehors de quelques institutions comme le musée des Confluences de Lyon, le musée Guimet ou le musée de L’Armée à Paris. Dans ce moment rare, « Daimyos, seigneurs de la guerre au Japon », immerge le spectateur dans un pan de l’histoire du pays du Soleil-Levant, souvent fantasmée mais au combien passionnante.